Le 1er avril 1959 - Le jour où j'ai failli exploser.
Sacré poisson d’avril. Après-demain je fêterai à Porto les 60 ans de ma survie.
Ce 1er avril 1959, notre peloton composé de chars et half-track marque une halte sur la route de Sebdou à 10 km de Lamoricière, face aux pentes du Djebel Guessaet-ed-Doum. Je me trouve tireur sur ce char identique en pièce jointe.
À vue, un Piper tournoie autour de ce massif et nous signale par radio des rebelles escaladant vers le sommet. Immédiatement repérés grâce à ma lunette de tir, j’averti le Chef de char qui donne l’ordre de tirer sur le groupe. Mais voilà, après une série d’envois, un dernier obus ne part pas et refuse de quitter le canon malgré plusieurs percutions et attentes, toujours dans l’action continue de l’opération par les autres chars. Toutes les tentatives ayant échouées et ne pouvant pas rejoindre le cantonnement avec un obus dans le canon pouvant partir à l’improviste, l’ordre est donné par mon Chef de char, Adjudant-Chef Desjardins, qui est également Chef du 1er Peloton, d’évacuer à tous les blindés et aussi à l’équipage de mon char dans un rayon de sécurité. Désigné, je me retrouve seul dans la tourelle, chargé de sortir de la culasse ce fameux obus percuté qui peut exploser à tous moments et faire un énorme feu d’artifice avec une quarantaine d’obus restant dans les soutes et plusieurs boîtes de munitions des 3 mitrailleuses, en réduisant tout le blindé en miettes. Une clé spécifique permettant d’ouvrir la culasse et voici apparaître petit à petit cet obus que je retire du canon et prends dans mes bras. Mais voici qu’il m’est impossible de sortir de la tourelle avec ce bébé qui doit faire dans les 70 cm. J’appelle à l’aide le radio-chargeur, Jacky Bouyer, un camarade courageux, qui heureusement m’entend et vient m’aider, sans obligation, en reprenant de l’extérieur cet obus que je reprends à mon tour au sol. Nous enterrons ensuite l’engin. L’équipage revient et nous mettons les voiles. La nuit vient de tomber et le ciel est constellé de fusées éclairantes envoyées pour la poursuite de l’opération par l’infanterie.
Georges Viéville.
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